Au Grau-du-Roi, Ségolène reine de l'arène

>> Midi Libre du 5/11/06

A la manade Jullian, hier, un certain Fred fêtait son anniversaire. Mais c'est évidemment Ségolène qui lui a volé la vedette. Du moins pendant une heure, celle que la candidate à l'investiture du PS pour la présidentielle a accordé in extremis à son comité de soutien gardois avant de se rendre à Narbonne.
Une heure, c'est aussi le temps que les 300 militants et sympathisants arrivés dès midi au Grau-du-Roi ont dû patienter avant de voir arriver, escortée par Robert Crauste, leur favorite. Motif : son avion (de ligne) avait du retard. Une vraie star peut-elle décemment arriver à l'heure dite ?
Tailleur praline, bottes de cuir, jupe, sourire fondant devant la meute de photographes et cameramen. « Elle est canon ! », s'exclame Zakia, venue d'Alès (section PS Robert-Gourdon), et revêtue d'un tee-shirt où est imprimé le "Royal" visage. Une œuvre d'un autre camarade alésien, Kamel, réalisée « à partir d'une photo trouvée sur internet ». Déjà fusent les « Ségolène présidente ! » alors qu'elle s'avance vers la frêle estrade dressée dans la petite arène de la manade. Et sur laquelle les places étaient chères...
Robert Crauste chauffe l'assistance avec des accents lyriques, appelant au « devoir de victoire », tout en dressant un sinistre tableau social et économique (textile, viticulture, pêche...) du département. Jérôme Talon, qui représente la fédération PS du Gard, lit un message ostensiblement consensuel : « Ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise ». Et de souhaiter « bonne chance à Ségolène » qui, enfin, prend la parole pour dire d'abord son « plaisir d'être ici, en pleine nature, sous ce soleil radieux, dans cette terre si belle, si authentique. »
Un discours d'un quart d'heure, où elle exalte d'abord le « socialisme du courage et des luttes contre toutes les formes de fatalité » (avec citation de Léon Blum). Où elle décline ensuite quelques « idées neuves » (« investir dans la recherche, l'innovation, l'environnement, gagner la bataille de la qualification professionnelle... ») Où elle invoque enfin les « valeurs traditionnelles » qui (lui) sont chères : éducation (« priorité des priorités »), famille, travail (« justement payé »), formation, culture et « accès aux sécurités pour tous. Et ce n'est pas être de droite que de dire qu'il faut un ordre social juste pour que les libertés soient respectées. » Pas un mot sur Sarkozy ou l'UMP mais une bonne pique à l'adresse de ses rivaux (« mais pas adversaires »), Fabius et DSK : « Je suis la seule qui n'ait pas dénigré, abaissé, caricaturé, qui n'ait pas porté atteinte à l'image des socialistes. » Au final, l'appel attendu : « Donnez-moi cette force dès le 1er tour (du vote interne au PS). Nous l'emporterons et nous redresserons la France ».
Des dizaines de photos plus tard, Ségolène s'en est allée. Nul ne sait encore vers quel destin, sinon celui que ses aficionados gardois réunis hier lui promettent déjà.